Page 18 - catalogue 2018
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il y avait, au XViiième siècle, deux
familles rivales de Dulac, marchands-
merciers, installées rue Saint-Honoré:
la première issue de peintres-doreurs,
à l’enseigne de la Tête d’Or et l’autre,
issue de gantiers-parfumeurs, à
l’enseigne du Berceau d’Or. Elles
furent tour à tour créditées de la
création et de la diffusion de ce beau
modèle de « vases candélabres à
ressort ». Aujourd’hui, des recherches
récentes ont permis de trancher en
faveur du Berceau d’Or, alors dirigé
par Jean Dulac (1704-1786),
marchand privilégié du roi. ce client
de la Manufacture royale de Sèvres
dont il hébergea à partir de 1758 un
des dépôts parisiens, y commanda
plusieurs modèles de « vases à
monter » dont celui-ci, en forme de
cloche renversée et couverte, qui
connut le plus grand succès surtout dans sa couleur d’un beau bleu turc. la
mode en culmina dans les années 1770.

Deux paires furent conservées, un temps, dans les collections nationales
françaises par suite des confiscations révolutionnaires chez les émigrés et les
condamnés. l’une d’elles, saisie chez la comtesse Du Barry, était déjà
mentionnée chez elle, à Versailles et à louveciennes en 1774. l’autre paire fut
confisquée chez le marquis Dominique-Joseph de cassini (1715-1790), rue de
Babylone dans le bel hôtel construit de 1768 à1771 par l’architecte du roi et du
prince de condé, claude Billiard de Belissard (1715-1796), hôtel aussitôt
richement meublé à la dernière mode. En fait, c’est surtout la veuve du marquis
qui était visée car, maîtresse du prince de condé elle menait, elle aussi, hors de
France, une intense activité contrerévolutionnaire.

ces deux paires de vases candélabres à ressort furent bientôt employées pour
l’ameublement des nouveaux maîtres du Directoire et du consulat, au Palais du
luxembourg et chez l’archichancelier cambacérès ; la paire cambacérès passa
par achat et par héritage dans les collections du duc d’Orléans devenu le roi
louis–Philippe, puis fut dispersée avec le mobilier du château d’Eu. l’autre paire
est aujourd’hui exposée au Palais de Fontainebleau.

Mais c’est surtout le modèle qu’il convient d’admirer car Jean Dulac a su
combiner une forme très pure inspirée de la chine en la magnifiant avec une
monture très virile utilisant à plein la dépouille antique du lion de némée.
l’aspect pratique et ludique n’y est pas négligé avec la surprise que procurent
les girandoles dissimulées à l’intérieur. l’auteur des bronzes n’en n’est pas connu,
mais on peut proposer le nom de nicolas- François Delépine (1720-1778) reçu
Maître-fondeur en 1753 et, à son décès, un des gros créanciers de Jean Dulac.

christian Baulez

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