Page 20 - catalogue 2018
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n Dulac (1704-1786)

Au début de sa carrière professionnelle, Jean Dulac exerce le même métier que son père Charles Dulac, marchand
gantier et parfumeur à Paris. En 1728, il se marie avec Marie Cécile Descariols Chevalier et habite sur le lieu de son
commerce rue Saint-Honoré, à l’enseigne du Berceau d’Or, qu’il rachète à son père en 1731. Veuf depuis 1740, Jean
Dulac se marie en secondes noces, en 1743, avec Marie Anne Gary. Ses affaires prennent une nouvelle expansion,
quand en 1753, il devient bijoutier-mercier et marchand privilégié du roi1.

Cette autorisation spéciale va lui permettre de vendre des porcelaines de la manufacture royale de Sèvres, et plus
particulièrement des « gobelets en cloche » appelés « vases-cloches ». Collaborant avec des bronziers, il fait embellir
les vases de montures en bronze doré à la dernière mode : le goût grec, dont le répertoire reprend des éléments
antiquisants. Ainsi, des têtes de satyres et guirlandes de laurier, apparaissent sur ses créations. Il invente des pots-
pourris feints garnis de mufles de lions portant des anneaux, avec une gorge constituée de postes ajourées et
couverts d’une prise en forme de pomme de pin. Ces derniers sont célèbres grâce aux ingénieuses girandoles
dissimulées à l’intérieur, elles sont actionnées à l’aide d’un piston et sortent ainsi de la panse du vase.

Modèles à succès entre 1763 et 1779, ces vases en porcelaine de Sèvres communément appelés « vases Dulac »
imitent les porcelaines de Chine monochromes et se déclinent en gros bleu, en bleu céleste ou en vert.

Aujourd’hui, les grands musées internationaux et plusieurs
collections particulières conservent quelques-uns de ces précieux
objets montés. La collection Rothschild à Waddesdon Manor et le
musée des Arts décoratifs à Paris présentent notamment une paire
de vases couverts, avec masques de satyres barbus et tores de
laurier. Plus rare, celui à fond vert, conservé au Wadsworth
Atheneum à Hartford, a vraisemblablement appartenu à madame
de Pompadour. Il cache à l’intérieur une statuette du roi Louis XV,
d’après Edme Bouchardon. Il est signé : « DULAC MD RUE ST
HONORÉ JNVENISTE »2.

Les vases-girandoles sont devenus les plus représentatifs de La signature Dulac sur la paire à Varsovie; photo © Muzeum
l’activité de Dulac. Une paire à fond « bleu nouveau » conservée au Łazienki Królewskie, Varsovie. ŁKr 85
Palais Łazienki à Varsovie porte l’inscription : « DULAC MD RUE ST
HONORÉ A PARIS INVENIT ». La comtesse Du Barry en possédait
deux à fond « bleu nouveau », comme ceux exposés au château de
Versailles. D’autres exemplaires sont conservés dans la collection
Huntington à San Marino et au Palais de Pavlovsk.

Le commerce de Jean Dulac est devenu au fil des ans très prospère, il compte parmi sa clientèle les grands
personnages de la Cour de France, dont la duchesse de Mazarin, la duchesse de Luynes, la comtesse de Polignac, ou
encore le prince de Chimay3.

Jean Dulac ne souhaita jamais véritablement se retirer des affaires, même s’il céda dès 1774, une grande part de son
activité à son confrère Pierre Antoine Le Baigue. Avec l’aide de Le Baigue, Dulac poursuivit son commerce de
marchand mercier jusqu’à sa mort qui survint, le 6 septembre 17864, dans sa maison à Boissy-Saint-Léger.

Sylvie Vriz, historienne d’art

1 Rose-Marie Mousseau-Herda (sous la direction de), La Fabrique du Luxe : les marchands merciers parisiens au XVIIIe siècle, cat. exp., Paris, Musée Cognacq-Jay, du
28 septembre 2018 au 27 janvier 2019, Paris-Musées, 2018, p. 140-141.
2 Xavier Salmon (sous la direction de), Madame de Pompadour et les arts, cat. exp., Versailles, Musée national des châteaux de Versailles et de Trianon, RMN, 2002,
p. 458-460.
3 Arch. nat., M.C., XC, 510, inventaire après décès de Jean Dulac, à partir du 12 septembre 1786.
4 Ibid.

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